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Studios Dino de Laurentis

Dossier
De tous les studios italiens, Dino de Laurentiis Cinematografica est sans doute celui qui a laissé le plus de traces dans la mémoire collective et aussi celui qui a le mieux réussi la synthèse entre cinéma national et international, entre films d'auteurs et exploitation commerciale. Cette entreprise doit tout à son fondateur, le truculent Dino De Laurentiis, qu'on peut aujourd'hui considérer comme le dernier grand producteur indépendant et dont la carrière a servi de modèle à celles de nombreuses autres figures du métier comme Menahem Golan ou Mario Kassar, pour ne citer qu'eux. Au total son activité cinématographique s'étend sur plus d'un demi-siècle, par le biais de plusieurs firmes : Ponti-De Laurentiis (PDL) puis Dino de Laurentiis Cinematografica (DLC) en Italie, De Laurentiis Productions (DLP), De Laurentiis Entertainment Group (DEG) et enfin Dino de Laurentiis Company (DDLC) aux Etats-Unis. C'est l'histoire de ces différentes compagnies que nous allons retracer ici, avec en fil rouge la vie et l'œuvre de ce personnage incontournable du cinéma mondial qu'est Dino de Laurentiis.


Ponti-De Laurentiis
Passons sur la jeunesse, peut-être agitée et sûrement romancée, de Dino De Laurentiis, né en 1919 à Torre Annunziata, en Campanie. Tout ce dont on est sûr est qu'il produit son premier film en 1939, à 20 ans. Il doit ensuite mettre sa carrière cinématographique entre parenthèses pour servir dans l'armée italienne pendant la 2nde Guerre Mondiale. Il est démobilisé en 1946 et se fait embaucher comme producteur exécutif par la plus grande compagnie italienne de l'époque, la Lux Films. C'est véritablement là qu'il fait ses premières armes, et acquiert une réputation nationale en 1949 lorsqu'il produit un des chefs-d'œuvre du néo-réalisme italien, Riso Amaro de Giuseppe De Santis, avec la diva Silvana Mangano qui deviendra sa femme quelque temps après. En 1952, il quitte la Lux pour fonder avec un autre producteur célèbre, Carlo Ponti, la compagnie Ponti-De Laurentiis. La première production de PDL est Toto a colori, de Steno, une pochade centrée sur le comique national Toto qui présente la particularité d'être le premier film italien en couleurs. D'emblée le ton est donné : PDL œuvre dans le cinéma populaire "de qualité" et n'hésite pas à mobiliser de gros moyens financiers. De 1952 à 1956, la firme produit de séries B, parmi lesquelles beaucoup de films de cape et d'épée réalisés par Mario Soldati, mais soutient aussi les figures de proue du néo-réalisme (Rossellini, Lattuada) et les jeunes talents dont Frederico Fellini qui signe La Strada pour PDL en 1954.


De Laurentiis Cinematografica
En 1956 Dino De Laurentiis se sépare de Carlo Ponti et décide de voler de ses propres ailes en fondant la compagnie De Laurentiis Cinematografica. Par sa structure et ses moyens, DLC se rapproche d'une "Major" hollywoodienne : elle dispose de son propre réseau de distribution, et à partir de 1959 de ses propres studios de tournage près de Rome. Les médias italiens auront tôt fait de surnommer l'endroit Dinocitta, en référence aux mythiques studios Cinecitta, ce qui n'est pas pour déplaire à Dino.
DLC marque de son empreinte la nouvelle vague italienne en produisant les films de Dino Risi, Luigi Comencini, Mario Monicelli, mais aussi Le Notti de Cabiria de Fellini en 1957. A côté de ces films "d'auteurs", Dino fait résonner le tiroir caisse en investissant dans le cinéma d'exploitation : péplum avec Maciste contre il vampire de Sergio Corbucci, parodie d'espionnage avec Danger Diabolik de Mario Bava… Enfin, DLC participe à des coproductions internationales de prestige en association avec les majors américaines. Il s'agit pour l'essentiel de péplums bibliques souvent pontifiants (Barabbas de Richard Fleischer, The Bible de John Huston) ou de films de guerre à grand spectacle (Anzio d'Edward Dmytryk, mais aussi une étonnante coproduction italo-soviétique, Waterloo de Sergueï Bondartchouk), tous tournés à Dinocitta.
Au début des années 70, une série de mauvaises opérations financières conjuguée à une crise structurelle de l'industrie cinématographique italienne précipite la faillite de DLC et la fermeture de Dinocitta. Dino ne baisse pas les bras et fait ses valises vers le pays du cinéma : les Etats-Unis.


De Laurentiis Productions
Aussitôt installé en Amérique, Dino crée une nouvelle structure, De Laurentiis Productions, moins ambitieuse toutefois que la défunte Cinematografica. DLP ne possède pas de studio propre et passe par les Majors pour distribuer ses films. Elle s'impose très vite aux Etats-Unis grâce aux succès de Serpico (Sidney Lumet, 1973), Three Days of the Condor (Sydney Pollack, 1975) et surtout de King Kong (John Guillermin, 1976). La reprise du film de Schoedsack et Cooper reste peut-être le plus beau coup marketing de Dino De Laurentiis. En tout cas, le succès du film doit énormément au producteur italien, que ce soit pour son choix avisé des acteurs (Jeff Bridges et Jessica Lange), de l'équipe technique (John Guillermin à la réalisation, Carlo Rambaldi aux effets spéciaux), ou ses déclarations fracassantes d'avant tournage, du style : "Pour 1976, Dino de Laurentiis vous souhaite une bonne année King Kong" ou bien "Je vous garantis que quand mon gorille mourra, personne ne pourra garder les yeux secs". En tout cas ça marche : le projet concurrent mis sur pied par Universal est annulé et le "Dino-Kong" connaît un véritable triomphe.
Le succès du film de Guillermin pousse DLP à creuser le filon du "film à animal géant". En 1977 la firme produit The White Buffalo, avec Charles Bronson et Kim Nowak, puis Orca de Michael Anderson, mais sans retrouver la qualité de King Kong. Au début des années 1980 DLP opère un tournant vers la science-fiction (le kitschissime Flash Gordon de Mike Hodges) et le film fantastique (la série des Conan), ce qui n'empêche pas Dino De Laurentiis de produire de temps à autre des films "d'auteurs" (Serpent's egg d'Ingmar Bergman en 1977, Ragtime de Milos Forman en 1981) afin de montrer qu'il n'est pas qu'un simple marchand de soupe.


De Laurentiis Entertainment Group
Le succès de ses superproductions comme King Kong ou Conan permet à Dino de réaliser un vieux rêve : ressusciter Dinocitta. En 1983 il crée le De Laurentiis Entertainment Group, entité totalement indépendante puisqu'elle dispose de son propre réseau de distribution et surtout de ses propres studios à Wilmington, en Caroline du Nord. Le vieux baroudeur italien règne désormais sur "l'Hollywood de la côte Est", et contrôle tous ses films de A à Z, de la conception à la distribution.
Le DEG consacre une grande part de sa production au fantastique, avec notamment une série d'adaptations de Stephen King, toutes plus ou moins ratées (la palme à Maximum Overdrive, réalisé par King lui-même !) à l'exception de Dead Zone de David Cronenberg. Dino rachète également les franchises Halloween et Evil Dead. Il fait preuve d'un goût plus sûr en signant David Lynch, qui réalise pour lui Dune et Blue Velvet. Les deux films ne manquent pas d'intérêt mais se solderont tous les deux par des naufrages financiers. Pour sauver les finances de son groupe en perdition, Dino met en chantier un King Kong 2 en misant sur le succès du premier film pour attirer le public. Le projet a de quoi séduire : Guillermin et Rambaldi sont à nouveau de la partie, et le film ne coûte rien en droits d'auteur puisque c'est déjà De Laurentiis Productions qui les détient. Il manque cependant une composante de taille : l'argent de Paramount, qui distribuait le premier King Kong. Cette fois DEG doit produire le film tout seul, et le budget mis sur pied est très nettement insuffisant. Résultat des courses : King Kong Lives !, sorti en 1986, est franchement risible et ne sera même pas distribué hors des Etats-Unis. Deux ans plus tard, DEG est en faillite et le studio de Wilmington doit fermer ses portes.


Dino De Laurentiis Company
De gros problèmes financiers obligent Dino à se mettre en retrait pendant deux ans. Il fait son retour par la petite porte en 1990 lorsque la MGM l'embauche comme producteur exécutif pour Desperate Hours de Michael Cimino. La même année il monte une nouvelle boîte de production, Dino De Laurentiis Company, sans réseau de distribution ni studio cette fois-ci. DDLC reste très discrète pendant les années 1990 et ne sort qu'une poignée de film dont Evil Dead III de Sam Raimi ou Assassins, avec Sylvester Stallone et Antonio Banderas. Le grand retour de Dino De Laurentiis sur le devant de la scène a lieu en 2000, lorsqu'il produit U-571, un spectaculaire film de guerre signé Jonathan Mostow. Depuis DDLC a réactivé le personnage d'Hannibal Lecter, le psychanalyste cannibale de Manhunter (Michael Mann, 1986) et Silence of the Lambs (Jonathan Demme, 1991), en lui consacrant deux nouveaux films : Hannibal (Ridley Scott, 2001) et Dragon Rouge (Brett Ratner, 2002). Dino devrait encore frapper fort en 2005 puisqu'il vient d'annoncer pour cet été le tournage d'une biographie d'Alexandre le Grand avec Leonardo Di Caprio et Nicole Kidman, court-circuitant ainsi Warner qui travaillait sur un projet identique. Le rusé producteur réussit ainsi un coup comparable à celui de 1976, lorsqu'il avait poussé au placard le King Kong d'Universal (qui distribuera cette fois-ci Alexander The Great de DDLC !).
En 2001, Dino de Laurentiis a reçu pour l'ensemble de son œuvre le prix Irvin Thalberg, qui récompense les plus grands producteurs de l'histoire du cinéma. Cette distinction prouve une bonne fois pour toute que le vétéran italien, que les critiques américains Harry & Michael Medved n'avaient pas hésité, dans les années 1980, à qualifier de "Dino The Horrendous" (!), n'est pas qu'un commerçant prêt à produire n'importe quoi pourvu que ce soit rentable, mais bien un visionnaire de la trempe d'un Darryl Zanuck ou David Selznick.


Dino-DVD
Recenser tous les films de Dino de Laurentiis parus en format DVD est un sacré casse-tête, compte tenu du fait que le vieil italien en a produit plus de 150 pour de nombreuses compagnies différentes, les siennes mais aussi des Majors hollywoodiennes pour lesquelles il travaillait parfois comme producteur exécutif. Sur ce catalogue foisonnant, on peut faire les remarques suivantes :
- La plupart des films de la période italienne n'ont pas été réédités sauf les Fellini (chez Criterion) et les superproductions cofinancée par Hollywood (Barabbas et Anzio chez Columbia-Tri Star, The Bible chez Fox).
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- Les films DLP sont disponibles chez les Majors qui les ont distribués à l'époque de leur création. On retrouve de nombreux titres chez Paramount (Serpico, King Kong, Orca, Dead Zone), mais aussi Universal (Conan the Barbarian) et MGM (Serpent's egg, The White Buffalo)
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- Après la faillite de DEG, les droits sur les films du groupe se sont éparpillés chez divers éditeurs. L'indépendant américain Anchor Bay a mis la main sur l'essentiel des films fantastiques (Maximum Overdrive, Manhunter, Evil Dead II), sauf en Allemagne où ils sont distribués par Kinowelt. Les autres films sont édités par les majors (Warner, MGM, Fox, Paramount, Universal…).
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- En ce qui concerne les films DDLC, Assassins est disponible chez Warner Home Video, U-571 chez Universal et Hannibal et Red Dragon chez MGM.


Filmographie sélective des productions Dino de Laurentiis


Ponti - De Laurentiis

Date

Date

Rélaisateur

1952

I tri corsari

Mario Soldati

1952

Europa 51

Roberto Rossellini

1952

Toto a colori

Steno

1952

Jolonda la figlia del corsaro nero

Mario Soldati

1953

Un Turco Napoletano

Mario Mattoli

1954

Dovè la liberta ?

Roberto Rossellini

1954

Miseria & nobilta

Mario Mattoli

1954

La strada

Frederico Fellini

1954

L'oro di Napoli

Vittorio De Sica

1955

La donna del fiume

Mario Soldati

1955

La bella mugnaia

Vittorio De Sica

1955

Mambo

Robert Rossen




De Laurentiis Cinematografica

Date

Titre

Rélaisateur

1957

Le notti de Cabiria

Frederico Fellini

1958

La Tempesta

Alberto Lattuada

1959

La grande guerra

Mario Monicelli

1960

Tutti a casa

Luigi Comencini

1961

Una vita difficile

Dino Risi

1961

Maciste contro il vampire

Sergio Corbucci

1962

Barabbas

Richard Fleischer

1962

Il commissario

Luigi Comencini

1966

The Bible

John Huston

1968

Anzio

Edward Dmytryk

1968

Danger Diabolik

Mario Bava

1968

Barbarella

Roger Vadim

1970

Waterloo

Sergueï Bondartchouk

De Laurentiis Productions / De Laurentiis Entertainment Group
Dino De Laurentiis Productions

Date

Titre

Rélaisateur

1973

Serpico

Sidney Lumet

1974

Death wish

Michael Winner

1975

Mandingo

Richard Fleischer

1975

Three days of the condor

Sydney Pollack

1976

King Kong

John Guillermin

1977

The white buffalo

Jack Lee Thompson

1977

Orca

Michael Anderson

1977

The serpent's egg

Ingmar Bergman

1978

The Brink's job

William Friedkin

1980

Flash Gordon

Mike Hodges

1981

Ragtime

Milos Forman

1982

Conan the barbarian

John Milius

1982

Halloween III

Tommy Lee Wallace

1983

Dead Zone

David Cronenberg

1983

Conan the destroyer

Richard Fleischer

1984

The bounty

Roger Donaldson

1984

Firestarter

Mark Lester

1984

Dune

David Lynch

1985

Cat's eye

Lewis Teague

1985

Red Sonja

Richard Fleischer

1985

Silver bullet

Daniel Attias

1986

Maximum overdrive

Stephen King

1986

Manhunter

Michael Mann

1986

King Kong lives

John Guillermin

1986

Blue velvet

David Lynch

1986

Transformers

Nelson Shin

1987

Evil Dead 2

Sam Raimi

1988

Rampage

William Friedkin

1993

Evil Dead 3

Sam Raimi

1995

Assassins

Richard Donner

2000

U-571

Jonathan Mostow

2001

Hannibal

Ridley Scott

2002

Red Dragon

Brett Ratner

Auteur: Sébastien Bouché
Date de publication: 01/07/2004
Dernière révision: 04/07/2004